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Antoine RESK D.

Les associations de marque, pour mieux comprendre la construction de la notoriété.


Je vous propose un article synthétique sur un levier de différenciation encore peu compris ou peu exploité dans les stratégies de marque. Pour mieux cerner la notion d’association de marque, il convient de la remettre dans son contexte, celui du capital-Marque ou Brand Equity,

I. Le Capital Marque

Dans la littérature qui a émergé à partir des années 1980 sur le capital-marque, la question de la valeur des marques se pose sous plusieurs angles : Comment définir ce qui fait la valeur d’une marque ? Comment faire le lien entre valeur marketing – pour les consommateurs et par rapport aux concurrents – et valeur financière – en termes de flux financiers ou de prix – mais aussi, entre valeur actuelle et valeur future ? Comment développer mais aussi exploiter la valeur d’une marque ?

Plusieurs auteurs se sont penchés avec pragmatisme sur la question comme David Aaker (1991) Leuthesser Lance (1988) mais gardons cette première approche de Leuthesseur vulgarisée par le Marketing Sciences Institute (MSI) :

L’ensemble des associations et des comportements des consommateurs de la marque, des circuits de distribution et de l’entreprise à laquelle elle appartient, qui permettent aux produits marqués de réaliser des volumes et des marges plus importants qu’ils ne le feraient sans le nom de marque, et qui leur donnent un avantage fort, soutenu et différencié vis-à-vis de leurs concurrents (Leuthesser, 1988).

Elle met également en évidence les principaux points sur lesquels repose le concept : le capital marque correspond à une performance supplémentaire que la marque apporte aux produits; cette performance peut s’envisager du point de vue du consommateur ou du point de vue de l’entreprise; elle se rajoute à celle des produits, d’où la séparabilité des deux notions, elle a une dimension concurrentielle et temporelle, elle est durable. Ces travaux permettent de structurer deux axes que nous ne développerons pas ici :

  • les conceptualisations du capital-marque du point de vue de l’entreprise (firm-based brand equity), pour qui le capital-marque est un concept agrégé;

  • et les conceptualisations du capital-marque du point de vue du consommateur (consumer-based brand equity), pour qui le capital-marque est un concept individuel.

Au-delà de ces concepts ce qu’il faut retenir c’est cette approche du capital-marque à travers sa manifestation dans la préférence et le choix des consommateurs. Le capital-marque est finalement cette "utilité additionnelle apportée par la marque au consommateur et que n’explique pas l’évaluation objective des attributs des produits". Partant de ce principe la transition est toute faite pour parler d’association de marque,

II. L'association de Marque

Définir l’association de marque, nous amène inéluctablement à parler de manière synthétique de mémoire et notamment de réseaux sémantiques avec la notion de network models (Collins et Quillian, 1969). La connaissance d’une marque se présenterait comme un ensemble d’associations organisées en mémoire autour du nœud marque par des liens plus ou moins forts. Pour décrire les représentations que les consommateurs se font d’une marque, on a alors recours à ces réseaux sémantiques. Ces associations peuvent être rappelées en mémoire par un processus d’activation (Collins et Loftus, 1975). Par exemple, lors d'un achat d’une tablette de chocolat ou d'un soda, un consommateur va penser à une marque donnée si, pour lui, cette marque est représentative de la catégorie de produits qu’il achète. Les connaissances associées en mémoire à cette marque sont à leurs tours susceptibles de lui venir à l'esprit : forme, goût, arôme, expériences passées, personnages associés, sensations, etc.

L’activation de ces éléments va alors dépendre de la force de leur connexion au nœud marque ainsi que du nombre de leurs connexions avec celui-ci. S’appuyant sur ces travaux, la littérature retient deux indicateurs perceptuels du capital-marque: l’attention par rapport à la marque et le réseau des associations de la marque (Keller, 1993 ; Feldwick, 1996, Krishnan, 1996). L’attention par rapport à la marque traduit l’accessibilité du nœud marque et des connaissances qui lui sont liées dans la mémoire des consommateurs.

L’attention est généralement mesurée par ce qu’on appelle « la notoriété spontanée et/ou assistée ». L’attention traduit partiellement la valeur de la marque : le choix du produit peut être déterminé par la simple émergence en mémoire du nom de la marque, et les connaissances stockées sur une marque peuvent favoriser le rappel et le choix de cette marque en particulier dans une situation d’achat donnée. Cela signifie que, parmi toutes les associations de la marque, seules certaines contribuent au développement d’une performance supplémentaire spécifique à cette marque.

Dès lors, vous l’aurez compris, les associations de marque sont nombreuses et variées et quand on prend le rayon de marques de tablettes de chocolat en GMS, on peut comprendre le désarroi du consommateur face au flux d’associations qui peut l’envahir devant des centaines de références. Alors comment se distinguer avec des associations de marque plus fortes me demanderez-vous ? Et bien la réponse nous amène à comprendre les caractéristiques de ces associations.

La principale contribution dans ce domaine est l’article théorique de Keller en 1993. Pour lui: «Brand Equity occurs when the consumer holds some favorable, strong and unique brand associations in memory ». De cette approche, il ressort que les associations de marque possèdent plusieurs caractéristiques qu’il importe de relever :

L’unicité des associations - être la seule à…

Les associations peuvent être ou ne pas être partagées avec des marques concurrentes. La plupart des marques partagent certaines associations. L’intérêt des associations uniques est avant tout de permettre à la marque de se différencier, ce qui peut se révéler d’autant plus important comme le dit Aaker dans des catégories de produits dits banalisés. Une association différenciatrice peut se révéler un avantage concurrentiel,

La force des associations

Une autre caractéristique des associations est la force de leur connexion au nœud « marque » (Keller, 1993). Aaker (1991) précise que les associations « existent et ont un degré d'intensité », ce qui laisse penser que certaines associations sont plus fortement liées à une marque que d'autres. Cela est intéressant dans la mesure où, du point de vue des networkmodels, la force de ce lien influence l'accessibilité de l'association en mémoire, notamment pour rappeler la marque.

La cohésion des associations

La cohésion est définie par Keller (1993) comme le degré de partage de contenu et de sens d'une association avec d'autres. Elle va influencer le rappel en mémoire des associations existantes ainsi que l'intégration de nouvelles associations. La cohésion (ou clarté) pour Aaker est l'opposé de la dilution. On s'attend à ce qu'une marque liée à des associations ayant une forte cohésion entre elles ait un sens et une image claire pour le consommateur, et que ses associations soient plus stables dans le temps. La cohésion pour Aaker (1991) fait aussi référence au degré d'accord entre les répondants, c’est l’association partagée par le plus grand nombre.

La favorabilité des associations

Certaines associations sont probablement évaluées plus favorablement que d'autres. Aaker(1991) et Keller (1993) posent alors l’hypothèse que, tout comme pour une extension, cette attitude positive envers une association puisse se transférer à la marque qui lui est liée.

Cependant, de même que les recherches sur les modèles multi-attributs ont montré qu'il est difficile d'évaluer comme bon ou mauvais un attribut qui ne serait pas important, on peut penser qu'une association favorable est également une association valorisée dans la décision d'achat ou de consommation.

Conclusion

Les marques comprennent aujourd’hui plus que jamais que le consom’acteur définit son acte de consommation comme un véritable acte sociétal, un acte de citoyenneté guidé par la volonté de modèles plus vertueux de production, notamment dans l’agro-industrie. Cultiver et associer aux marques des valeurs fortes, uniques et qui suscitent l’adhésion des consommateurs parait plus que nécessaire. Intégrer dans la stratégie de marque l'existence d'associations possédant ces caractéristiques peut être largement considérée comme susceptible d'influencer l'existence d'une attitude générale positive, d'augmenter la probabilité de choix de la marque et la fidélité, de diminuer sa vulnérabilité face à ses concurrents, de jouer sur son potentiel d'extension.

Pour aller plus loin dans la lecture

AAKER, David, Managing brand equity: capitalizing on the value of a brand name, New York, The Free Press, 1991, 299 p.

COLLINS, Allan, QUILLIAN, Ross, « Retrieval Time from Semantic Memory », in Journal of Verbal Learning and Verbal Behavior, 1969, vol 8, pp. 240-247.

FELDWICK, Paul, «Do we really need brand equity? », in The Journal of Brand Management, Vol. 4, n° 1, 1996, pp. 9-28.

KELLER, Kevin Lane, « Conceptualizing, Measuring and Managing Customer-based Brand Equity », in Journal of Marketing, vol 57, n°1, 1993, pp. 01-22.

KRISHNAN, H. Shanker, «Characteristics of memory associations: a consumer-based brand equity perspective», in International Journal of Research in Marketing, 1996, vol 13, n°4, pp. 389-405.

LEUTHESSER L., KOHLI C.S., HARICH, K.R., « Brand equity: the halo effect measure », in European Journal of Marketing, vol 29, n°4, 1995, pp. 57-66

LEUTHESSER, Lance, « Defining, Measuring and Managing Brand Equity », Report n°88-104, Marketing Science Institute, Cambridge MA, 1988.

SRINIVASAN, Venkataraman, « Networks Models for Estimating Brand-specific Effects in Multiattribute Marketing Models », in Management Science, vol 25, n°1, 1979, pp. 11-21.

TOMASELLA, Saverio, La dynamique de la marque, CEM, 2003


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